Le 10 mars 1906 aurait dû être un jour comme les autres. Malheureusement, il deviendra pourtant celui que personne n’oubliera jamais. Au petit matin, soudain la terre tremble, les vitres explosent et le cauchemar de plusieurs milliers de familles devient brutalement une réalité. Des poussières de charbon se sont enflammées et ont ravagé plus de 100 kilomètres de galeries à une vitesse effarante, emportant pêle-mêle le matériel, les chevaux et les hommes.
Ce samedi 10 Mars, le maire de Méricourt, Bernard Baude, a accueilli le Préfet du Pas-de-Calais, Fabien Sudry, accompagné de Jean-François Raffy, Sous-Préfet de Lens avant de rejoindre les élus des collectivités, les représentants des associations, des syndicats et la population présents à la Nécropole. Un lieu emprunt d’émotion marqué par une cicatrice qui ne se refermera jamais au regard de ces 1099 victimes d’une catastrophe qui fut bien plus qu’un coup de grisou.
Une émotion toujours bien présente lorsqu’a débuté les nombreux dépôts de gerbes au pied du monument. Une succession de recueillements conclue par un discours fort de Raymond Frackowiak qui, en évoquant cette catastrophe, a rappelé que 13 survivants sont remontés au jour trois semaines après. « Ces rescapés ajoutent à la colère, l’amertume des mineurs et de leurs familles dans la mesure où ils mettent en exergue l’attitude contestable des dirigeants de la compagnie dans la gestion des opérations… ».
Après tant d’années, le secrétaire général CGT-FNSS-FSM tenait à rappeler l’histoire de cette catastrophe, « dont l’analyse a permis de prendre un certain nombre de dispositions qui, de catastrophe en catastrophe, n’a pas permis d’y mettre un terme, seulement à la suite de l’arrêt de notre exploitation charbonnière. Mais d’autres pays, d’autres hommes sont victimes du grisou, du non respect des règles de sécurité au nom de la production et des appétits financiers ».
Non loin du site du souvenir, c’est à la salle Aimé Lambert que Bruno Troni a mis l’accent sur la fraternité qui s’est imposée à 300 mètres et plus sous terre : « On se considère comme camarades et comme soutiens réciproques. L’existence sociale n’existe guère, il n’y a ni grands, ni petits. En réalité, nous sommes tous petits et bien faibles et impuissants en face de l’imprévu redoutable dans la poussière et les ténèbres.
Rappelant les faits de cette terrible journée, le maire de Billy-Montigny rejoignait les propos de Raymond Frackowiak, s’indignant comme beaucoup sur un patronat exploitant n’hésitant pas à risquer la vie de leurs ouvriers. « 550 survivants seront remontés le premier jour. Mais très vite. Trop vite, la décision est prise de remblayer les galeries. Les recherches s’arrêtent mettant un terme à tout espoir de retrouver des survivants. La mine devient un tombeau ».
Cette catastrophe, qui fut la pire d’Europe, coûta la vie à 1099 mineurs dont 242 enfants, des galibots de 13 à 17 ans. «Toutes ces vies perdues pourraient suffirent à justifier la commémoration de cette journée. Mais à travers elles, c’est aussi l’histoire d’un conflit social, d’un crime patronal que nous voulons et devons rappeler à vie. L’exploitation minière a cessé, mais l’exploitation tout court se poursuit au profit du rendement et des placements financiers ». Et de conclure par une citation de Victor Hugo : « C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches ».
M. Le Préfet a salué la mémoire des hommes et des enfants qui sont morts ici dans les mines lors de la catastrophe du 10 mars 1906. « Et il ne faut pas oublier en ce début du XXe siècle, la réalité de l’extrême dureté de la condition ouvrière et singulièrement celle des mineurs extrayant le charbon nécessaire aux industries sidérurgique et métallurgique en plein essor et contribuant d’ailleurs à l’histoire de notre Nation ».
– Publié le 12/03/2018
[(
)]